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Message du bord #14

Horta

N38°32’00

W28°38’00

Bonjour à tous,

Nous voici de retour à Horta, après un stop repérage à Terceira, puis à Sãö Miguel où nous sommes allés chercher notre nouvel ambassadeur, le spationaute Jean-François Clervoy. Son passage à bord est en train de se finir, mais avec tout ce qu’il s’est passé, j’avoue que j’ai pris du retard dans mon message de bord. Pour tout vous dire, ça fait 4 fois que je change mon intro, vu que l’on est jamais au même endroit ! Alors je garde son histoire pour un prochain message de bord, mais je peux déjà vous dire que lui aussi est connecté avec les Dieux question météo !

Nous avons passé la semaine passée à Horta, sur l’île de Faial.

Horta, le célèbre port d’Horta, lieu de passage obligé pour tous les marins du monde qui sont en transhumance entre le continent européen et américain.

En fait, ce qui est surtout célèbre, ce sont les hortensias si typiques d’ici (malheureusement nous arrivons à la fin de la saison) et le bar Chez Peter, où aucun des patrons ne s’est jamais réellement appelé Peter… Mais Chez Peter, c’est plus qu’un bar, c’est un lieu de rencontre, où tous les marins du monde laissent une trace de leur passage et un bout de leur histoire. J’ai eu la chance de connaitre Chez Peter quand j’avais 9 ans, alors que mon père avait décidé de faire participer Pen-Duick (1898) à la route des Hortensias. Pas sa plus brillante idée mais c’est bien agréable de revenir 27 ans après !

Chez Peter, c’est aussi l’endroit où le marin au long court peut récupérer son courrier, alors quand je suis arrivée, le fils du dernier Peter (qui nous a quitté il y a quelques années) savait déjà que Pen-Duick VI arrivait, car sans que je le sache, nous avions déjà du courrier qui nous attendait. C’est toujours quelque chose de vivre une tradition que de nombreux marins ont déjà vécue…

L’autre tradition à Horta, c’est de laisser une trace de son bateau sur le quai d’Horta. Chaque dalle transforme le quai en immense Walk of Fame, ici Altaïr, la Velsheda, Endevour, Ashanti, se mélangent aux dessins de voyageurs, pour la plus part “tourdumondistes” en famille.

Pour le notre, j’ai travaillé en association avec une artiste Bretonne et amie, Amélie Fish. Elle a fait le dessin, j’ai tenté de le reproduire sur la pierre. On a du quitter Faial avant que j’ai eu le temps d’effectuer les finitions, je pensais pouvoir le finir maintenant mais la pluie me demande de patienter encore un peu, alors ce sera pour notre prochain passage, dans quelques jours.

A Faial, nous avons rencontré le photographe sous-marin et apnéiste Fred Buyle ainsi que les scientifiques de l’université d’Horta. Fred est venu vivre il y a 7 ans à Horta, vous découvrirez bientôt son histoire en interview. Pour lui, l’apnée est un outil, au départ pour exercer sa passion et évoluer dans le monde sous-marin, puis pour se construire. C’est devenu ensuite un métier en tant que sportif professionnel, parcourant le monde pour les championnats et records du monde. Un jour, la rencontre avec un boîtier photo lui permet de le faire évoluer et de passer du sport à l’art de l’apnée. Il est un des rares photographes sous-marins à ne travailler qu’en apnée et en lumière naturelle. Ses compétences et sa lecture animale en font un intermédiaire très recherché pour établir un lien humain faune marine.

Après quelques jours à laisser passer le vent d’Est, rendant toute mise à l’eau impossible, nous avons eu l’occasion de les accompagner sur leur travail de marquage de requins bleus et de raies Mobula au « Condor Bank » puis sur le « Princess Alice Bank ».

Dans notre prochaine vidéo, nous vous relaterons cette expérience qui fut passionnante pour moi qui suis habituée à travailler sur le rapport proie-prédateur entre chevaux et hommes. Pour la première fois, je me retrouvais à évoluer dans l’eau, de prédateur à prédateur. Les règles sont claires, simples. Toujours avoir un contact visuel avec eux, et ne jamais reculer. Je passais mon temps à les compter, 3, 4, 5, 6, 3, 4, 5…5… Il est où le 6ème ???

Dans l’eau, nous ne sommes pas chez nous mais bien chez eux alors, nous essayons au maximum de ne pas envahir leur espace personnel. Et au bout de quelques instants, ils viennent nous voir, nous frôlent, nous jaugent et repartent. Nous ne sommes ni un danger ni un concurrent alors nous pouvons cohabiter ensemble dans l’eau.

Les raies sont bien sûr très différentes. Contrairement aux requins qui sont solitaires, elles se déplacent en banc. Ce jour là, elles étaient une trentaine à apparaitre puis disparaitre dans le grand bleu… Elles qui peuvent descendre à plus de 7m / secondes, inutile de dire que vous ne nagez avec elle que lorsqu’elles le veulent.

Vous découvrirez le détail de cette aventure dans notre 2eme vidéo, « Du macro au micro ».

Une expérience de plus qui prouve que nous devons et nous pouvons vivre avec nos voisins merriens, et que l’exploration marine doit permettre de mieux les connaître… Sans compter que notre avenir, notre survie dépend aussi de la leur. Je rejoins Jacques Rougerie  sur le fait que la Planète Terre devrait peut-être s’appeler Planète Mer, elle étant si recouverte par l’Océan. Nous ne connaissons qu’à peine 1% des Océans. 1 %… La masse est tellement immense…

Les Océans se meurent, des requins au plancton, nous détruisons, polluons, déréglons.

Comme si pour un peu d’argent, nous étions prêts à tuer Terre et Mer… Mais je veux rester optimiste, nous pouvons changer les choses mais ce ne sera pas facile, voire même de plus en plus difficile au fur et à mesure que le temps passe.

Le planning ici s’emballe un peu, nous enchaînons les rencontres et interviews, Nicolas et Florence Hulot viennent d’arriver à bord et Billy Bob (Jean-François Clervoy) repart ce soir.

Je vous refais un message de bord un peu plus inspiré rapidement, celui-là n’est pas mon meilleur, un peu trop de choses en tête, ça arrive !

Nous partons pour Terceira demain, ça va nous aérer un peu les neurones.

Kenavo et bon quart à tous,

Marie